Lassé d'attendre que les Swarm host deviennent utiles dans Starcraft 2, j'ai un jour eu l'idée folle de revenir à un type de jeux que j'avais délaissé depuis bien longtemps... Le MOBA.Après avoir dépensé quelques heures de ma prime jeunesse sur Demigod, en solo car il était bien difficile de faire autrement, j'ai tout de suite compris l'intérêt de ce genre de jeu, mais la bande de rageux et le déluge d'insultes qui m'accueillirent à l'époque, m'ont vite fait déchanter. Mais bon voilà. Marre de prendre des fessées sur le ladder d'HOTS(Heart of the Swarm), marre d'attendre les tutos Zerg de Pomf pour enfin devenir pro gamer. Il me fallait du changement. Le bébé du demi dieu Chris Taylor, qui avait mis une petite baffe à ma carte graphique de l'époque, s'est alors rappelé à mon bon souvenir. Quid des nouveautés dans le genre ? LOL (League of Legend), Dota2 (Defense Of The Ancients), feu ou presque HON (Heroes Of Newerth). Voyons ça...
Tous s'accordent à dire que ce genre de jeu demande un investissement considérable, pas question ici de violer le ladder à coup de 6 pool, puisque les parties durent en moyenne trois quarts d'heure et que votre vie, ainsi que celle de vos 4 co-équipiers ne tiennent souvent qu'à un fil. Champion du miss click ou parent incapable de laisser brailler le mioche seul pendant trente minutes, passe ton chemin.
Puisqu'il fallait s'investir, j'ai dû faire un choix.
Jouer à HON ? Non, ça serait comme s'échiner à apprendre le latin. À quoi bon ?
LOL ? La communauté est impressionnante. C'est plutôt jol... Bon ben non plus ! J'ai une carte graphique convenable, pourquoi me limiterais-je à un jeu qui pourrait être un mod de Broodwar ?
Me reste donc Dota2, la suite de leur ancêtre à tous. Dota2 et ses nombreux héros gratos. Dota2 et sa plateforme bien foutue. Dota2 qui graphiquement envoie un peu de pâté. Dota2, passé chez Valve, et son intégration poussée de Steam, mais nous en reparlerons.
C'était vite vu en fait.
Dota2 est un MOBA, un jeu de stratégie multi-joueurs où deux équipes de cinq héros s'affrontent sur une carte que tous connaissent par coeur (puisqu'il n'y en a qu'une) où le but est de repousser des vagues d'ennemis générées périodiquement et de pourrir la base adverse. Ami qui n'a rien compris à tous les acronymes de l'introduction, qui n'a visiblement rien d'autre à faire puisqu'il a quand même tenu jusque là, te voilà informé.
Première étape avant de lancer le jeu, regarder quelques heures de vidéos sur les chaînes de Lively ladder ou DMX pour se faire la main. L'idée n'est pas de devenir pro gamer d'entrée mais leurs vidéos ont le mérite d'être d'excellentes introductions pour décrire les principes du jeu et les champions qui le compose. Mater des heures de vidéo pour jouer à un jeu, ça ressemble à Metal Gear Solid, c'est vrai, sauf que là, on joue au bout d'un moment.
Étape deux, la partie se lance. Chaque joueur choisit un avatar parmi une pléiade de héros en fonction de ceux pris par ses équipiers ou les adversaires, héros répartis en trois grandes familles : force, intelligence, agilité. Pas besoin de maîtriser sur le bout des doigts les règles AD&D pour comprendre que ce choix influencera le comportement qu'il vous faudra adopter sur le terrain. Car s'il y a bien une chose à intégrer dans Dota, c'est que c'est un jeu d'équipe. Comprenez par là qu'on gagne ensemble, mais qu'on perd toujours à cause du débutant (souvent hélé après une mort d'un affectueux : « Fucking noob, please report this stupid bastard »). Ces appellations peuvent choquer de prime abord, mais d'une, on s'y habitue tellement qu'on en vient vite à les prévoir, de deux, il faut comprendre vos co-équipiers : si depuis le début de la partie, vous ne faites pas grand chose, et que vous vous prenez les pieds dans le tapis au moment qui devait être Votre moment, ce qui en général est suivi de votre mort, de celle de vos amis d'un jour, de la perte d'une ou deux tours et donc presque de la partie, vous venez de gâcher une heure de leur précieux temps. Avouez que ces grivoiseries semblent presque justifiées. Mais on parle ici d'un phénomène qui ne touche que les premières parties, à peine une cinquantaine. Ensuite, vous pourrez mettre à profit les longues heures d'enseignement d'insultes en langue de Shakespeare en les distribuant à tour de bras. Chacun son tour après tout.
La partie se lance et vous vous retrouvez devant une liste interminable de héros. Vos co-équipiers en choisissent certains, les adversaires d'autres, tout est transparent dans un but évident d'adaptation de stratégie. En bon noob, j'ai demandé qui je pouvais prendre pour ma première partie. On m'a conseillé Pudge le boucher, l'incarnation de la boulimie, evicéré, armé d'un hachoir et d'un immense crochet pendant au bout d'une chaîne. « Tu vas voir, c'est un sac à HP, il peut solo lane (défendre un axe seul), init (initier un combat), ganker (chasser les ennemis imprudents) et son hook est le best signature move ever. C'est le Perso au top. » Mon co-équipier avait juste oublier de mentionner qu'il fallait savoir le jouer pour espérer faire tout ça, car si c'est un perso très fun, même au début, il n'est pas moins un avatar exigeant que ce soit pour la gestion des magies ou des items. Bref, pas forcément le meilleur perso pour débuter.
Je vous passe les détails du viol monumental qui s'ensuivit. Un viol certes, mais un viol ludique car j'ai beaucoup appris. Oublions ces quelques considérations perverses et concentrons-nous sur le fait que j'ai pu jouer à peu près convenablement avec un perso que je ne connaissais ni d'Eve ni d'Adam. Pourtant chacun des avatars a un minimum de quatre magies et la liste des items disponibles est longue comme le bras. Mais comment se fait-ce ?
Dans sa grande mansuétude, Valve via Steam a créé un espace communautaire dédié à Dota2. Comme pour tous les jeux de la plateforme, il est possible d'uploader images et vidéos mais surtout, et c'est ce qui nous intéresse ici, de proposer des guides de personnages. Guides, qui décrivent la façon de faire évoluer le héros et les équipements à utiliser en fonction de votre ressenti de la partie. Si c'est déjà une bonne initiative, elle devient excellente lorsque lesdits guides sont accessibles dans l'interface du jeu et viennent même modifier cette dernière (une surbrillance, une popup explicative, ...) en fonction des préférences choisies. En terme de prise en main, c'est assez incroyable et si on y ajoute une roue de dialogues bien pensée qui traduit automatiquement vos paroles à chacun des joueurs, on tient sans doute une des interfaces communautaires les plus abouties qui existe.
J'ai (re)testé pour vous l'expérience MOBA après plusieurs années d'abstinence et si elle m'est d'abord apparue comme un trip sado-masochiste qui ne pourrait jamais se démocratiser, je dois bien avouer qu'aujourd'hui, quand j'ai une heure à tuer, je lance Dota2 plutôt qu'enchaîner deux ou trois parties de Starcraft. Si les premiers pas sont durs, que la quantité de héros et d'objets peut paraître décourageante dans un premier temps, l'effort apporté aux guides et à la simplicité de communication entre joueurs apporte une accessibilité indéniable à ce titre élitiste. Toi, ami, à qui ce genre de jeux fait peur, regarde quelques vidéos, lit quelques guides et tente ta chance, moi et mon crochet, plus affûté que jamais, nous t'attendons avec impatience.